Le jour n’était pas levé quand Christophe s’est mis en route pour une longue ascension dans le calme, savourant la fraîcheur encore présente. Petite frayeur de mon côté au réveil en me rendant compte qu’il avait oublié son sac porte flasques. Heureusement, il avait quand même son téléphone et deux gourdes ; il n’avait pas voulu me réveiller en réalisant son oubli au moment de quitter le camping. Elias et ses compétences techniques nous ont manqué au moment de refermer la fenêtre qui bloque un peu. Nous avons réussi malgré tout à lever le camp de bonne heure, à éviter un petit mouton qui s’était éloigné de son berger et traversait la route puis à redonner à Christophe son sac en cours de route, le pauvre étant passé au lieu dit « Sansac » peu de temps auparavant… Tout serait allé pour le mieux si je n’avais pas oublié la veille que nous ne passions pas par Ginestet mais devions seulement le tangenter. Me voici engagée avec Hannah et surtout avec notre gros véhicule dans le centre du hameau qui s’avère être, devinez quoi ?… un cul de sac. Quel concours de circonstances propice à jeux de mots mais surtout un gros coup de stress devant l’impossibilité de faire demi-tour, confirmée par un habitant. Nous avons donc attendu Christophe pour qu’il guide la marche arrière, nécessaire pour nous sortir de ce mauvais pas. La route d’accès n’était guère plus large que notre camping-car, bordée d’un petit fossé, en pente, et zigzagant avant le passage d’un tout petit pont… j’oublie de dire que j’étais immobilisée contre d’autres voitures…. À tel point que Christophe a dû replier un rétro pour que je puisse refaire le chemin inverse...on dit parfois que l’amour est aveugle mais là, c’est ma confiance aveugle en Christophe qui nous a permis de nous sortir de cette impasse à reculons… Soulagée et heureuse de cette issue, je suis repartie sur mes deux jambes pour la montée au Col de L’Espinouse (1124m), le premier de plusieurs. La redescente s’est révélée magnifique, dévoilant des vues et des ravins impressionnants. J’ai retrouvé ce sentiment de surplomber la nature, consciente de ne pas la dominer, me sentant minuscule, perdue au milieu de nulle part. Je me sentais d’ailleurs davantage en sécurité seule qu’au moment de croiser trois gars à côté de leur camionnette. Les Hommes sont une drôle d’espèce : ne pas se sentir en sécurité au milieu de ses congénères est un comble… en parlant plus tard avec Hannah, nous avons convenu que la situation n’est pas toujours idéale non plus pour les mantes religieuses, point de départ de quelques plaisanteries… Je suis arrivée au bout de mes 14 km, rassurée par un cycliste me saluant d’un surprenant « Votre mari vous attend en bas » qui m’a laissée perplexe et amusée! Hannah a pris mon relais et j’ai enfourché le vélo. Nous avons bien discuté et ri tout en commentant la végétation changeante : chênes verts, châtaigniers. Hannah était beaucoup plus en forme qu’hier et a pleinement profité de sa portion en descente. Arrivées dans le charmant village de Combes, nous avons laissé Christophe repartir le long d’une route dont certains arbres seulement semblaient témoigner d’un incendie passé. Nous sommes allées acheter deux bouteilles de boisson artisanale fermentée aux plantes : Géranium rosat et Basilic, l’une fleurie et l’autre bien verte, toutes deux rafraîchissantes à souhait. Christophe courait pendant ce temps entre 5’ et 5’30 au kilo sur une belle petite route de montagne tout en lacets menant au fond de la vallée et rejoignant après quelques péripéties une piste cyclable. Hannah et moi avons terminé sur cette même piste jusqu’à Tarassac, sous un soleil impitoyable dont nous avons été protégées lors de passages sous des tunnels sombres et frais à souhait. Nous avons vu des mimosas et des albizias, plantes du sud. Arrivés au camping, nous avons mangé, essayé de nous reposer mais souffrant trop de la chaleur, nous sommes allés nous baigner un bon moment dans l’Orb pour faire baisser notre température. Le repos est bien nécessaire comme en témoignent nos oublis et péripéties du jour. Nous espérons que la nuit ne sera pas trop étouffante et allons essayer de partir tôt demain, sachant que l’air de la montagne est maintenant derrière nous.