Dix-septième marathon. Premier abandon. Une pierre noire dans mon jardin. Toujours ça que les pissenlits n'auront pas. Mais pourquoi s'avère encore Alain l'élu de mon
Deezer Tube ?
Ch'aipas... Ch'aipas... Mais, reprenons à la racine.
Une prépa pas ordinaire
J'avais bien noté les particularités du plan pour lequel je venais d'opter :
- pas de semaine 4 allégée, mais un bloc monolithique de 8 semaines
- pas une séance sans qualité : pas d'alternance qualité / récup'
- des séances longues à allure... plutôt soutenue
D'emblée, les sensations procurées par ces séances, toutes qualitatives, m'enthousiasment
Les semaines se suivent et se ressemblent -
1,
2,
3,
4 - jusqu'au milieu du gué. Jusqu'au milieu du gai... et d'un savoir que je ne maîtrise pas.
Ach, mein Gott ! sagte Hermagotte
En faudra-t-il encore, du temps, pour que j'apprenne enfin ce que je sais déjà et devienne, pardi, ce que je suis ! Ainsi gambergeait
Magoo le niais alors qu'il en finissait - qu'il peinait et rigatait à en finir - avec sa 4ème sortie longue, prévue initialement comme suit : 1h15 à 14 km/h, puis 1h à 15,5 km/h. Voila que sa
folle jeunesse de clébard estropié le rattrapait et lui mordait la queue à l'improviste, tel un serpent sournois moqueur de la pauvre pomme (clairement à l'ouest d'Eden) comme de la nécessaire rigueur préparatoire du petit marathonien illustré, mais visant naïvement à s'illustrer positivement. Mais, va savoir... Quand sourd l'enthousiasme sourd d'une jeunesse qui ne se veut point sage encore, alors sans doute (pour dire les choses simplement) l'atavique rigorisme en vigueur s'efface et laisse la place à...
la foire au bestiau. Où l'honnête homme improvisé, parvenu des/aux plus hautes sphères, oppose un impatient, infantile et incongru "
casse-toi, pôv' con ! " à l'Amour de la sagesse - Philo Sophia (Lorraine oblige ?).
Avez-vous trouvé la voie ? Je vais d'abord vous couper la tête ! Puis vos jambes cavaleront enfin. Sans frein. Mais disons les choses sans fard. Sans talonnettes.
NB : t'as l'honnête que t'as voulu, l'ami ! fallait pas t' tromper à c' point d'bulletin ! mais, voici venue l'heure de te racheter et de permettre à l'incriminé d'aller ailleurs faire son blé - comme d'autres font leurs besoins - avec une naturelle et inimitable élégance. J'ai déconné, surestimé mes capacités... et accru la dette. J'ai trop longtemps - 4 semaines durant - couru à crédit. M'en voici aujourd'hui bien puni
Au sortir de ces
33km en 2h13, achevés dans la douleur -
dites 33 - arghhh ... dites 33 ! - rraaaahhhh - je me retrouve donc d'abord sous la douche, hagard, puis bientôt alité, empyjamaté et fébrile. Je commence à percevoir et accepter ce que je subodorais sans doute avant même l'entame de la préparation : j'ai trop donné, trop tiré sur la corde... et suis prêt à choper le premier virus qui passera par là. Inutile d'attendre la fin de la foire au bestiau pour savoir qui sera déclaré la bouse, le puant, le valet de Satan lançant sans cesse ses piques à la valetaille, soit : quiconque vu de lui... ou d'un chien. Sans plus tarder, je tombe malade.
Pour de vrai. Pas pour de semblant. On dirait qu'on serait les indiens et que si j'aurais su, j'aurais moins couru... ou plus intelligemment, pardu ! Ca me file des boutons rien que de penser à quel point je mériterais les "
passe, quoi ! mauve thon !" du petit homme en bleu... s'il respectait la petite dame en vert et son combat contre la pêche au rouge poisson, avec lequel
tout il est bon. Mais, non... ça ne tient pas la route. Le dit poulbot/nabot, puisant dans ses ressources inépuisables - elles - opposerait à la dite dame, pas assez brune à son goût sans doute, un cinglant "
mais avec le beurre, tout il est meilleur ! ".
Le diagnostic confirme une sinusite. Comme en 2010, en préparation du... marathon d'Annecy ! J'entame aussitôt -
ou presque - la prise des granules prescrits. Mais ne pousse pas la sagesse -
je l'ai virée de la foire quelque temps plus tôt - jusqu'à annuler ma participation au SMIVO, support du championnat de Lorraine de semi-marathon, dont je reviens certes satisfait d'un titre de champion de Lorraine V1, acquis dans la douleur, mais surtout... bien plus à plat encore qu'après la précédente séance longue dominicale.
Les 3 dernières semaines de préparation sont passées à tenter d'éradiquer le mal - d'habitude, l'homéopathie me retape en 2 ou 3 jours... j'ai vraiment dû piocher pour être dans cet état ! - en tâchant de ne pas trop m'éloigner du plan prévu. Las... Je ne peux faire que la moitié des séances. Et encore, celles-ci ne sont que l'ombre des séances programmées. A l'ombre d'icelles, donc, je m'achemine vers la phase de relâchement (semaines 7 et 8) qui aura pour le coup également fonction de phase de convalescence.
Une météo à rester au chaud
Arrive le Jour J : dimanche 15 avril 2012. Départ de la course à 8h30.
Pas mal de copains sont à Paris, notamment Nicolas Meunier que nous avions rencontré pour la première fois à Annecy en 2010 (10ème en 2h32, il améliorera son chrono d' 1minute cette année sur le macadam parisien). La sinusite est passée. Depuis 1 semaine. La préparation également. Depuis 4 semaines
C'est la première fois que je prends le départ d'un marathon avec une préparation de 4 semaines suivie d'une phase d'atermoiements, de 4 semaines également. Même en se conditionnant psychologiquement -
on visualise la victoire (sur soi), l'arrivée et l'euphorie qui s'ensuit, les sensations positives - il faut reconnaître que la situation n'est guère favorable. De toutes les
connaissances, réelles ou
virtuelles, présentes ici aujourd'hui, je ne croiserai que mon frère Arnaud et - surprise ! - Didier Parcot, un mosellan, un voisin, rencontré pour la première fois lors de la
3ème Ronde du Val Saint-Pierre en début d'année.
L'échauffement se fait sous un petit crachin frisquet mais pas trop venté, jusqu'à 8h20. Nathalie s'est mise à l'abri, en compagnie de Claire, ma belle-soeur. Nous leur laissons, Arnaud et moi, quelques affaires
(pour moi : un bidon de boisson d'attente maison - merci, Aroche - et un coupe-vent) et recueillons quelques encouragements réconfortants. Il fait déjà moins frais, d'un coup. Je souhaite une bonne course à Arnaud et nous nous dirigeons chacun vers son sas.
Pas de jus, pas de sensations, mais... on y croit /
KM 1 et 2 : le peloton s'étire à la faveur de la petite boucle introductive avant de revenir sur la pelouse du Bout du Lac. Chacun prend ses marques / son allure. En repassant au niveau du Pont des Amours, avant de prendre la route en direction de Sévrier, je suis dans un groupe de 4/5 coureurs, sur une base idéale de 3'40 à 3'45 au kilo.
KM 3 à 5 : Nous courons sur la piste cyclable en bord de route - ce n'est qu'au 5ème km que celle-ci est (enfin !) en site propre, utilisant le tracé d'une ancienne voie ferrée. Je suis intercalé entre 2 groupes : celui dont je viens de m'extraire (car ils restent sur 3'45 et je vise 3'40 à partir du 5ème km) et celui de 5 ou 6 échappés, 150 à 200m devant moi. Je lève un peu le pied et laisse un coureur me reprendre pour tenter de remonter ensemble sur le groupe de devant. Mais l'allure continue de 3'40/km - celle répétée à l'entraînement - ne passe pas bien. La sensation d'être déjà dans le dur - on n'est pourtant pas au 30ème ! - alors que je devrais être en endurance, certes soutenue, mais facile. Je dois donc à nouveau lever le pied pour redescendre autour de 3'42 à 3'45/km.
KM 6 à 7... 8... 9 : On gère. Au train. Mauvaises sensations
Nathalie est présente et m'encourage au km7, de même que mes parents qui ont pris quelques jours de vacances à Annecy
... Je ne les vois pas. Ne les entends pas
En fait, j'attendais le ravito du km10 pour prendre un gel (un peu avant le ravito) et j'ai été surpris/perturbé de voir un ravito dès le 7ème... j'ai alors ingéré le gel à la hâte pour prendre le gobelet d'eau dans la foulée... sans me douter qu'il y aurait 2 ravitos supplémentaires et successifs aux km9 et 11. Quelle drôle d'idée, franchement ! C'est pourtant simple de faire simple et respecter une norme, fut-elle implicite : un ravito tous les 5 kilos. Point barre. Du coup, je suis
pris dans mon truc, stressé, et zappe Nathalie et mes parents... dont je commence à me demander s'ils ont manqué le point de rdv que nous avions fixé. De fait, je ne les reverrai qu'au point suivant, fixé au 14ème kilomètre, à 200m de notre location.
Premier 10km passé en 37'10. Ce serait bon... avec de bonnes sensations.
KM 10 à 14 : Je m'affaisse de plus en plus et commence à subir la course. De 3'40 initialement, l'allure a dû passer à 3'45, puis sans doute pas loin de 3'50/km à présent. La sensation de peser une tonne. Pas facile de voler dans ces conditions. Au km14, Nathalie et les enfants m'encouragent, ainsi que mes parents et Pascal, le frère de Nathalie. Un petit sourire pour les encourager également - pour les préparer peut-être à une déception qui commence à se préciser - et je m'engouffre dans le tunnel... dont je ressortirai, au retour, dans 15km. Nous sommes à Duingt où un éperon rocheux s'avance dans le lac que le train d'antan traversait et les cyclistes/marathoniens d'aujourd'hui traversent plutôt que de le contourner.
KM 15 à 20 : Cette portion est la plus désagréable de mon point de vue. Elle l'avait déjà été 2 ans plus tôt, malgré des sensations de course bien meilleures. Un faux-plat montant et de longues lignes droites monotones, où nous passons régulièrement sous de petites passerelles qui me font l'effet de potences. Pour arranger le tout, c'est vers le 20ème km que les petits panneaux bleus annonçant "
la défaillance est humaine" commencent à faire leur apparition. Comme à dessein. Afin d'aider ceux qui se pensent dans le dur... à s'en convaincre.
Ah ? La défaillance est humaine ? Alors, je suis humain ! Trop humain ! Et n'ai plus dès lors qu'à mettre le clignotant, puisqu'on m'y invite si gentiment. Une sacré c....rie, ces panneaux
Autant, à Sénart, les organisateurs ont pris l'habitude de proposer une petite séance de sophrologie la veille de l'épreuve ; autant ceux d'Annecy semblent avoir pris le parti inverse :
"si vous voulez abandonner, nous pouvons vous y aider ! "
Second 10km passé en 39'20, soit 2'10 de perdues sur le premier. Ce n'était pas qu'une impression : l'allure a méchamment chuté.
KM 20 à 25 : Plus guère d'entrain. Pourtant, je me refais un peu la cerise en abordant la boucle du Bout du Lac (l'autre "bout"), à Doussard. Je passe le semi en 1'20'30 (2' de retard) et m'accroche tant bien que mal au groupe qui vient de me reprendre, entre le 20ème et le 24ème km où nous retrouvons la piste cyclable et les coureurs qui arrivent au 20ème que nous croisons désormais (le parcours fait un aller-retour sur la piste cyclable entre le 3ème et le 20ème km).
KM 25 : Je croise Arnaud. Nous nous encourageons mutuellement.
KM 26 à 29 : Le début de contracture au mollet gauche, qui se précise progressivement depuis le semi, ne me laisse plus guère de doute sur l'issue de la course, ni l'occasion de gamberger plus longtemps : j'ai le choix entre (1) finir à tout prix - au-delà des 2h45 voire 2h50 - et me blesser durablement ou (2) accepter d'abandonner et ainsi préserver la suite de la saison, c'est à dire : le 100 bornes prévu fin août.
Au 26ème, je commence à alterner marche et course, puis reste définitivement sur la marche. Pas trop joyce, le gars. Plutôt renfrogné, désabusé, contrit. Pas glop, quoi.
KM 29 : La sortie du tunnel et... la sortie du tunnel.
Je retrouve Nathalie, les enfants, les parents... un mot d'explication/d'excuse... et Nathalie m'accompagne à l'appart que nous louons à 200m de là. Un bon bain chaud pour favoriser le début de la digestion. Demain est un autre jour... Dans l'immédiat, c'est Arnaud qui va bientôt arriver. Hop... en route pour Annecy et encourager le frérot dans les derniers kilos !!!
Pfffffff
Encore une aventure qui finit en eau de boudin. En queue de thon. Dans la maison de Marat. Ce ne fut pas Arcole... pas de quoi se réjouir. Maintenant, fokon s'y r'colle... yapuka r'bondir. Au suivant !